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Pierre Edouard LEPAGE

La loi climat et résilience : quels enjeux pour l’immobilier Tertiaire ?

Bureau Veritas s’engage depuis plusieurs années, à travers des actions concrètes, à bâtir un monde de confiance. Il se positionne en tant que véritable partenaire des différentes parties prenantes pour créer de la valeur ajoutée sur le long terme. Pierre-Edouard LEPAGE, Responsable d'activités chez Bureau Veritas Solutions partage la vision du groupe.

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Pierre Edouard LEPAGE

Pierre-Edouard LEPAGE Responsable d'activités, Bureau Veritas Solutions

Le projet de loi Climat et résilience, actuellement en débat au sénat, représente-il une opportunité de voir émerger des bureaux vraiment verts ?


Le projet de loi climat a pour ambition de proposer des actions visant à réduire les émissions nationales de gaz à effet de serre d’au moins 40% d'ici à 2030. Il intervient dans un contexte où notre pays et, a fortiori, le secteur de l’immobilier doit accélérer pour respecter ses objectifs en termes de résilience climatique. Ces objectifs sont ceux pris dans le cadre de nos engagements pris auprès de l’UE et dans le cadre de l’Accord de Paris en fixant pour cap l’atteinte de la neutralité carbone dès 2050 sur notre territoire.

Pour notre sujet des immeubles tertiaires, ce projet de loi intervient dans une actualité réglementaire particulièrement dense avec le Décret éponyme pour le parc existant et la RE2020 pour les constructions neuves.

A noter d’ailleurs que les obligations d’actions de réduction des consommations d’énergie finale de 40 % en 2030 dans les bâtiments à usage tertiaire issues du Décret Tertiaire n’entrainent pas d’obligation de réduction d’émission des GES dans cette proportion. En effet, le texte prévoit d’éviter une aggravation : « le changement de type d’énergie utilisée ne doit entraîner aucune dégradation du niveau des émissions de gaz à effet de serre ».

Le projet de loi climat constitue donc une réelle opportunité pour accentuer le rythme et l’intensité des efforts énergétiques puisqu’il existe un risque réel de ne pas tenir les objectifs nationaux et européens à 2030, si la trajectoire n’est pas rapidement infléchie.

Les deux mesures phares en matière d’immobilier semblent la lutte contre les passoires thermiques et la limitation de l’artificialisation des sols.
Est-ce que ces mesures vont impacter l’immobilier de bureau ?

Ces deux points sont en effet au coeur du titre IV du projet de loi. Les mesures présentées pour lutter contre les passoires thermiques concernent les bâtiments résidentiels et visent, en outre, à lutter contre la précarité énergétique. Les bureaux ne seront pas impactés sur ce point mais ne sont néanmoins pas laissées pour compte avec le Décret Tertiaire. En revanche, la limitation de l’artificialisation des sols va bien impacter l’immobilier de bureau. En effet, l’article 48 « … tend à limiter l’artificialisation des sols et à aboutir, à terme, à l’absence de toute artificialisation nette de ceux-ci… ».

Les conséquences de l’étalement urbain sont multiples : biodiversité, climat et vie terrestre. Un sol artificialisé n’absorbe plus le CO2 et perd donc son rôle de puits de carbone. Il participe donc à la hausse du réchauffement climatique.

La programmation des opérations de bureaux devra donc intégrer cette composante en favorisant le renouvellement urbain et l’optimisation de la densité des espaces urbanisés.

Quelles seront les conséquences de cette loi sur le marché de la construction tertiaire selon vous ?

Le marché de la construction va devoir accompagner cette tendance structurelle qui vise à réduire le bilan carbone des opérations. D’abord, il s’agira de mieux maîtriser les impacts en termes d’émission de GES des phases de construction et de démolition. Pour ce faire, fabricants et constructeurs ont un rôle majeur à jouer en proposant des matériaux et équipements alternatifs moins carbonés et en se formant aux techniques de mise en oeuvre.

C’est une tendance que nous observons déjà et qui devrait s’intensifier : matériaux biosourcés, réemploi, etc.

Est-ce que cette nouvelle loi va favoriser le marché de la rénovation énergétique pour les immeubles tertiaires ?

De notre point de vue, cette loi ne va pas directement favoriser la rénovation énergétique pour les immeubles tertiaires. La notion de réversibilité des bâtiments peut-elle enfin émerger grâce à cette loi ? Les dispositions de l’article 54 introduisent une étude de potentiel de changement de destination du bâtiment qui pourrait entrer en vigueur au 1er janvier 2023. Un décret doit venir préciser « les catégories de bâtiments pour lesquelles cette étude doit être réalisée et son contenu ».

Certains acteurs de l’immobilier ont déjà ce réflexe. Pour les autres, ce projet de loi permettra de positionner la réversibilité dès la programmation pour limiter les démolitions et ainsi réutiliser des ressources existantes. Nous sommes convaincus qu’un actif immobilier conçu avec un potentiel de réversibilité et d’évolution future sera de nature à créer de la valeur. En ce sens, cette notion va nécessairement s’inscrire dans la durée.


Pour autant, des obstacles techniques fi nanciers et réglementaires demeurent, notamment dans le cadre de réhabilitation d’immeubles non conçus à cet effet. Il faudra les lever pour que la réversibilité, bien que de bon sens, ne devienne la norme.

Quels sont les sujets sur lesquels le législateur pourrait aller encore plus loin selon vous ?

Ce projet n’est qu’une étape dans le chemin réglementaire qui attend le secteur. Il est nécessaire de se réaligner sur les objectifs de rang supérieur, à savoir atteindre la neutralité carbone en France en 2050. 

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